Masques à gaz pendant la Grande Guerre

Bien qu’il y eut des brevets déposés, des procédés connus ainsi que des prémices d’équipements de protection respiratoires existants avant le début du XXème siècle, le développement du masque à gaz moderne s’est produit durant la première guerre mondiale afin de protéger les soldats des nouvelles armes chimiques utilisées durant le conflit. Découvrez l’histoire du masque à gaz première guerre mondiale.

Les armes chimiques durant la première guerre mondiale de 14-18

Les armes chimiques du début du siècle

Depuis l’antiquité les armes chimiques – et biologiques - ont été utilisées au combat. Les historiens rapportent l’utilisation de poisons (ergot de seigle, racines d’ellébore, curare), de gaz sulfureux, et de fumées toxiques suffocantes (soufre, nitrates, térébenthine, etc...) dans l’immense majorité des guerres et conflits armés ayant eu lieu au fil des siècles. A la fin du XIXème siècle, les guerres, notamment de Crimée et la Guerre de Sécession ont privilégié le développement rapide des armes d’artillerie telles que les canons. Cependant, à cette époque, les armes chimiques ne sont pas en reste et les obus remplis d’oxyde de soufre, d’acide picrique ou de chlore sont à disposition des états-majors. Avant le début de la première guerre mondiale, les Français ont également conçu une une grenade suffocante. Au début du XXeme siècle, l’Allemagne possède une industrie chimique très développée. Le pays est devenu un géant mondial de la chimie et est capable de développer rapidement les armes chimiques qui évolueront tout au long de la guerre. Malgré la signature de la convention de la Haye en 1899 et 1907, la France, l’Allemagne et de nombreux pays ne cessent pas leurs recherches, et ne renoncèrent pas à l’utilisation de ces armes lors de la première guerre mondiale. La conception du masque à gaz première guerre mondiale est donc primordiale.

Les armes chimiques de la guerre de 14-18

Dès le début de la première guerre mondiale, les armes chimiques sont utilisées : en août 1914 l’armée française utilise dans des grenades une nouvelle arme : le gaz lacrymogène (créé à l’origine par la police parisienne). L’Allemagne de son côté exploite son industrie chimique et développe des armes à base de chlore.

L’escalade dans la guerre chimique est lancée en 1915 par l’emploi d’obus à gaz sur le front Est le 31 janvier 1915. Cette attaque allemande échoua à cause de la température très froide sur le front polonais qui étouffa la dispersion et les effets du gaz. Cependant le 22 avril 1915 dans les Flandres et plus précisément dans le secteur d’Ypres, l’Allemagne lance la première attaque aux gaz à grande échelle en déversant plus de 150 tonnes de chlore sous pression. Le gaz se diffusera vers les tranchées ennemies sous l’action du vent. Le nuage de gaz intoxiqua près de 15000 soldats et on dénombra plus de 1000 morts dus à cette attaque chimique. Après cette date, la recherche et l’usage des armes chimiques s’intensifie des deux côtés de la ligne de front. Fournir un masque à gaz première guerre mondiale à tous les soldats devient alors une priorité.

En mai 1915 des attaques au phosgène, mixtures de chlore et oxyde de carbone font 6000 morts sur le front russe. Les Allemands développent une nouvelle substance à base de Brome. Dès septembre 1915, les français font leur première attaque massive aux gaz en utilisant des obus avec du disulfure de carbone (élément très toxique à forte concentration mais qui devient inefficace lorsqu’il est diffusé dans l’air). En 1916 les obus français remplis de de phosgène provoquent de lourdes pertes dans les tranchées allemandes. Et à partir de juillet 1917 le gaz moutarde utilisé par les allemands, puis re-synthétisé par l’armée française fait de nombreuses victimes des deux côtés du front jusqu’à la fin de la guerre.

Tout au long de la première guerre mondiale l’acide cyanhydrique, l’arsine, le brome, le chlore, le phosgène et autres éléments chimiques composent des artilleries chimiques de plus en plus meurtrières. On estime à plus de 130000 tonnes les quantités d’armes chimiques utilisées lors de la première guerre mondiale, et on dénombre plus de 90000 morts dues à ce type d’armes durant le conflit.

Les effets des armes chimiques de 14-18

Dès 1914, les différentes armes chimiques utilisées telles que le chlore et le gaz lacrymogène, diffusent des substances nocives susceptibles de provoquer des irritations sensorielles (notamment des douleurs oculaires), des incapacités temporaires, des blessures internes et externes et peuvent aller jusqu’à provoquer la mort. Les différent systèmes utilisés par les soldats en tant que masque à gaz première guerre mondiale n’étaient pas suffisants pour les protéger.

Durant toute la première guerre mondiale, alors que le développement des armes chimiques avance les soldats sont pris de douleur, crachent du sang, sont asphyxiés, sont victimes de brûlures chimiques, perdent la vue, et meurent sous le coup de ces attaques.

Parmi les gaz de guerre les plus connus - et couramment utilisé - pendant la guerre de 14-18, l’utilisation du gaz moutarde (également connu sous le nom d’ypérite) fut particulièrement dévastatrice. En effet ce composé chimique utilisé par les deux camps provoquait de grandes souffrances physiques (brûlures, asphyxie, cécité, réactions cutanées, infection des muqueuses des voies respiratoires pouvant parfois entraîner la mort). L’utilisation de gaz comme armes de guerre visait à incapaciter l’ennemi, à provoquer son repli et également à démoraliser et fragiliser l’adversaire en infligeant des souffrances psychologiques.

Les gaz de combat utilisés pendant la première guerre mondiale peuvent aujourd’hui être filtrés via un masque à gaz pour protéger un individu de ces effets, mais cela n’a pas toujours été le cas.

Les premiers masques à gaz de 14-18

Des soldats munis de protection respiratoire de fortune

Au début de la première guerre mondiale les troupes sont très mal protégées contre les attaques au gaz. En effet, le masque à gaz moderne n’existe pas encore, les soldats bricolent alors des systèmes de protection respiratoires de fortune. En 1914 seuls les soldats allemands étaient équipés de protections respiratoires (en réalité de simples baillons).

Face aux armes chimiques, et plus particulièrement au chlore, un officier médical canadien recommande aux troupes de placer sur la bouche et le nez un tissu épais imbibé d’une solution d’eau, de bicarbonate de soude et d’urine. L’ammoniac contenu dans l’urine réagissant avec le chlore permettait d’échapper aux effets des nuages de chlore.

Suite à la première grande attaque chimique d’Ypres en 1915, la France et ses alliés se lancent véritablement dans une course à la conception de protections respiratoires pour les unités combattantes. Le développement du le masque à gaz première guerre mondiale pour les soldats devra se faire à grande vitesse. Les systèmes de protection respiratoire par compresses se développent rapidement. Les Alliés créent tout d’abord des baillons copiés sur les modèles allemands trouvés sur le front. Ils se composent d’une enveloppe de tissus contenant des cotons imbibés de solution d’hyposulfite. Mais cette enveloppe qui tient sur le visage grâce à quatre lanières ne suffit pas pour protéger entièrement les voies respiratoires car ces masques ne sont pas étanches. Malgré cela les systèmes de protection respiratoire par compresses se développent rapidement. Du côté des alliés on voit ainsi apparaître des solutions de plus en plus efficaces comme le tampon P2 et son sachet S2, puis le tampon T et TN.

Les forces armées françaises poursuivent leur avancée dans les équipements de protection en ajoutant des lunettes à la panoplie de défense contre le gaz dans le but de protéger également les yeux et une partie du visage. Cependant c’est seulement en 1916 que ces lunettes seront étanches, ajustables et réellement efficaces contre les gaz. De leur côté les anglais développent des cagoules qui semblent plus efficaces. Elles sont donc reprises par les français pour compléter l’efficacité du bâillon et des lunettes.

A chaque nouvelle substance, les solutions neutralisantes et les protections contre les gaz, qu’elles soient dédiées aux voies respiratoires ou aux yeux, doivent évoluer. Elles doivent bien entendu être efficaces contre les nouveaux gaz, mais également conserver leur efficacité contre les procédés précédents, qui continuent à être utilisés. C’est une guerre technologique qui s’engage entre les chimistes et ingénieurs des deux camps.

Les premiers masques à gaz

A l’automne 1915 les Allemands sont équipés de ce qui s’apparente aux masques à gaz modernes. Le Gummimaske fut le premier masque complet, fabriqué en tissu caoutchouté, et équipé d’un système chimique filtrant interchangeable : la cartouche filtre. Ces premières cartouches filtrantes étaient composées de charbon végétal, d’hyposulfite et de carbonate de soude. Particulièrement bien pensé, le masque était imperméable au gaz lacrymogène et au gaz moutarde, et offrait une protection efficace contre les fortes concentrations de phosgène, cependant la cartouche filtrante était inefficace contre le phosgène à son introduction.

Du côté des Alliés c’est réellement en 6 décembre 1916, que le premier masque à gaz première guerre mondiale apparaît et est distribué sur le front. Il s’agit d’un masque complet recouvrant la totalité du visage et utilisant un système de compresses faisant lieu de filtre. Le masque offre un bon champ de vision assuré par une vitre en plastique rectangulaire. Le masque à gaz est maintenu sur le visage grâce à 2 sangles élastiques. Au fil de son développement le masque évoluera avec l’installation d’œilletons et permettra de protéger les soldats sur une période de 5 heures.

Un nouveau modèle de masque à gaz première guerre mondiale à partir des masques dont disposent l’armée allemande est développé par les alliés à l’été 1916. La production de ce masque démarre au début de l’année mais les premiers équipements seront distribués aux soldats alliés début 1918. Ce nouveau masque à gaz appelé ARS (appareil respiratoire spécial) ou masque MCG (matériel chimique de guerre) constitue la protection respiratoire disponible la plus efficace pour les alliés à ce moment. Le système de protection respiratoire de l’ARS est un système de filtration par cartouche. Particulièrement efficace, au fil de son évolution le masque exploitera différents types de filtres notamment des cartouches au charbon aggloméré par de l’eau glycérinée. Le masque ARS est bien conçu: en plus des voies respiratoires, le masque équipé de sangles en tissu élastique permet de protéger entièrement le visage et les yeux des soldats. Malgré l’apparition des masques à gaz ARS, les soldats ne délaissent pas les dispositif M2. Ces premiers masques à gaz sont alors utilisés comme équipements de protection respiratoire de secours dont les principes et le fonctionnement sont identiques à ceux des masques de fuite utilisés de nos jours dans les situations d’urgence.

Ces premiers masques à gaz de combat fabriqués à des milliers d’exemplaires, seront développés et sans cesse améliorés jusqu’à l’armistice le 11 novembre 1918, et continueront d’être fabriqués après la guerre pour de nouvelles applications civiles. Les technologies de protection respiratoire filtrantes et d’équipements de protection respiratoire isolants développées durant la première guerre mondiale constituent les prémices des outils que nous connaissons aujourd’hui. Le masque à gaz moderne, les cartouches filtrantes ainsi que les masques de fuite et auto-sauveteurs sont utilisés chaque jour dans le monde entier pour protéger des millions de pompiers, de travailleurs, et d’intervenants dans de multiples industries à travers des milliers d’applications.